
L'absence d’un parent laisse une empreinte profonde. Lorsqu’un père ou une mère s’éloigne, l’enfant ne comprend pas. Il ressent. Il capte les silences, les regards fuyants, les mots que l’on ne prononce pas.
Un très jeune enfant ne sait pas pourquoi ce lien s’efface, mais il sent l’absence comme un froid qui s’installe. Un enfant un peu plus grand pose des questions, sans toujours obtenir de réponses. Parfois, il s’imagine que c’est sa faute, qu’il n’a pas été assez sage, assez aimant, assez important pour retenir celui ou celle qui est parti. Et quand l’adolescence arrive, cette absence peut devenir une colère sourde, un vide qui s’installe dans l’ombre des non-dits.
Certains enfants tentent de compenser. Un petit garçon qui voit sa mère souffrir cherche à devenir l’homme de la maison, portant sur ses épaules un poids trop grand pour lui. Une petite fille, elle, peut se refermer, refusant de faire confiance à ceux qui pourraient, eux aussi, disparaître. D’autres, au contraire, font tout pour oublier, pour avancer sans regarder en arrière, mais ce vide intérieur finit souvent par se rappeler à eux.
En grandissant, cette absence se transforme. On croit l’avoir laissée derrière soi, et pourtant, elle refait surface dans nos choix, dans nos peurs, dans nos relations. Il y a ceux qui ont peur de l’engagement, par crainte de revivre un abandon. Ceux qui choisissent des partenaires qui les font souffrir, inconsciemment guidés par l’espoir de réparer ce qui n’a pas pu l’être. D’autres encore répètent les schémas familiaux, jurant de ne jamais faire comme leurs parents, mais s’enfermant malgré eux dans des injonctions rigides et douloureuses.
Et puis, il y a ce sentiment diffus, ce vide que l’on ne parvient pas à nommer. Une sorte de mélancolie permanente, une sensation d’être toujours en quête de quelque chose sans savoir exactement quoi. Cette absence devient un poids invisible, un murmure silencieux qui empêche d’être pleinement heureux. On avance, mais sans jamais se sentir totalement complet.
Quand le parent qui s’était éloigné vient à disparaître définitivement, une autre douleur surgit. Le temps a figé les choses à jamais. Il n’y a plus d’occasion de se retrouver, plus de possibilité de combler le fossé. Parfois, la culpabilité s’invite : pourquoi ne suis-je pas allé le voir ? Pourquoi ai-je continué ma vie comme si tout allait bien ? Et ce deuil, qui aurait dû se faire bien plus tôt, devient un fardeau encore plus lourd.

Alors, comment guérir de cette absence ? Comment faire la paix avec un passé qui ne peut plus être changé ?
Il faut d’abord accepter que cette souffrance est légitime. On a le droit d’avoir mal, le droit d’être en colère, le droit de ressentir ce vide. Il faut aussi se donner la permission de dire au revoir, même après tant d’années. Parfois, un simple rituel symbolique peut aider : écrire une lettre que l’on ne donnera jamais, parler à une photo, allumer une bougie en guise d’adieu. Il existe aussi des accompagnements pour aider à traverser ce processus, que ce soit par la thérapie, les soins énergétiques ou les constellations familiales.
Mais surtout, il faut apprendre à se choisir. À cesser de porter des poids qui ne nous appartiennent pas. À se libérer de ces attentes silencieuses qui nous retiennent. À comprendre que l’on peut avancer, non pas malgré cette histoire, mais en en faisant un tremplin pour se reconstruire avec plus de conscience et d’amour.
Dans une société où tout va vite, où l’on nous demande d’être forts et résilients, il est essentiel de prendre le temps de ressentir, d’accueillir et de se libérer. L’absence d’un parent est une blessure qui ne doit pas être ignorée, mais qui, lorsqu’elle est reconnue et travaillée, peut devenir une opportunité de transformation intérieure. S’autoriser à guérir, c’est faire la paix avec le passé et s’offrir un avenir plus aligné et apaisé.
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